Ebola n’est pas la seule maladie infectieuse à toucher l’Afrique. La persistance d’autres épidémies témoigne d’une situation sanitaire critique. L’anthropologue Yannick Jaffré revient sur les faiblesses structurelles qui minent le continent.
Les dernières données épidémiologiques font état de 14 000 cas plus ou moins confirmés et de 5 000 décès dus au virus Ebola. Comment ne pas être touché par l’extrême solitude des malades et par l’éthique absolue de ceux qui les soignent ou tentent de prévenir la propagation du virus ? Le respect s’impose. Derrière ces aspects immédiats, et particulièrement dramatiques, Ebola pose également des questions de fond, directement liées aux sciences sociales et à la façon dont celles-ci abordent les épidémies : les contextes sociétaux dans lesquels ces maladies infectieuses se développent, la qualité des interactions entre les services de santé et les populations, le choix des politiques de santé ou, encore, les modalités d’application de ces politiques.
La pauvreté, terreau des maladies infectieuses
Si Ebola fait aujourd’hui les gros titres, elle n’est pas la seule maladie infectieuse à toucher l’Afrique, loin s’en faut. D’autres épidémies, moins évoquées par les médias, existent sur ce continent à l’état endémique : choléra (3 à 5 millions de cas et environ 120 000 décès annuels), méningite (80 000 cas et de 5 000 à 6 000 décès annuels), diarrhées (700 000 à 800 000 décès d’enfants par an), rougeole (120 000 décès annuels)… La plupart de ces pathologies infectieuses se déploient dans des contextes de grande pauvreté. Ainsi, 29 des 35 pays que compte le continent africain sont considérés comme étant « à faible développement humain ». À l’évidence, ces maladies infectieuses sont avant tout des maladies de la pauvreté et des révélateurs d’inégalités. Les guerres et les dysfonctionnements des États ont fait le lit d’Ebola et expliquent largement l’impossibilité des systèmes de santé à répondre à la situation.